Délais de paiement : pourquoi une loi est nécessaire...

Publié le par Stéphane Jeanneteau

undefinedPar une conspiration mêlant intérêt et ignorance, les délais de paiement ont été considérés dans notre pays depuis quarante ans comme une question économique de second ordre. En réalité, il s'agit aujourd'hui, encore plus qu'hier, d'une question macroéconomique majeure. Les entreprises françaises consentent à leurs clients 600 milliards d'euros de crédit, plus de quatre fois ce que consentent les banques aux entreprises en matière de crédit commercial. Le délai des encaissements est aussi un triste record français. Les autres grandes économies européennes sont toujours bien meilleures. Délais et retards atteignent ainsi en moyenne, selon Intrum Justitia, 66 jours en France en 2005 contre 47 jours en Allemagne ou 52 jours en Grande-Bretagne. Les pays qui ont des délais de règlement moyens plus grands (Espagne et Italie) compensent leur handicap par des procédures de type clearing en Italie ou par des émissions de garanties bancaires spéciales en Espagne. Cela revient à donner aux fournisseurs une possibilité de pure liquidité à partir de 30 à 40 jours.

 
 

Sur plan conceptuel, l'existence d'un tel pactole appelle de multiples remarques quant à son incohérence et son immoralité économique. Ici, simplement, on se bornera à dire que cette masse énorme financée par les fournisseurs, intégrée à la trésorerie de leurs clients, est complètement stérilisée pour les investissements de ses vrais propriétaires. Et que, traitée comme une ressource gratuite par ses détenteurs, elle est privée d'une grande part de son efficacité économique. Dans ce jeu à somme négative, les perdants prêteurs sont bien sûr les petites entreprises plutôt industrielles de type sous-traitant. Les principaux bénéficiaires sont les grands des secteurs de la distribution, les constructeurs automobiles, les grandes entreprises de travaux publics et bien sûr l'Etat. La galerie des gagnants explique à elle seule la force de résistance à l'efficacité économique globale. Elle montre aussi que tout changement passe par une attitude courageuse et vigoureuse de l'Etat régulateur et l'Etat client.


Source :  Les échos

 

 

Publié dans Les dossiers

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