En douze mois, Carrefour efface quatre ans de recul

Publié le par Stéphane Jeanneteau

La grande distribution :  l'actualité

En douze mois, Carrefour efface quatre ans de recul

           

Carrefour est de retour. Le numéro deux mondial de la distribution, qui perdait régulièrement du terrain ces dernières années face à ses principaux concurrents en France, connaît actuellement un net regain de performance. Entre juin 2005 et juin 2006, l'enseigne d'hypermarchés a gagné 0,6 point de parts de marché. L'enseigne détient désormais 14 % du marché de la distribution alimentaire, selon l'étude "Référenseigne", publiée jeudi 14 septembre par TNS Worldpanel.

Parts de marché de juin 2005 à juin 2006 sur les produits de grande consommation et les produits frais en libre service.

 

LECLERC :                                                                              17,1 % (+ 0,1)

CARREFOUR :                                                                         14 % (+ 0,6)

INTERMARCHÉ :                                                                      11,5 % (+ 0,1)

AUCHAN :                                                                               9,7 % (- 0,1)

SYSTÈME U :                                                                          8,4 % (+ 0,2)

CHAMPION (CARREFOUR) :                                                      8,1 % (0)

LIDL :                                                                                     4 % (- 0,1)

GÉANT (CASINO) :                                                                  3,7 % (- 0,2)

LEADER PRICE (CASINO) :                                                        3,2 % (- 0,2)

CORA :                                                                                   3 % (0)

ATAC (AUCHAN) :                                                                   2,8 % (- 0,1)

ED (CARREFOUR) :                                                                  2,2 % (+ 0,1)

ALDI :                                                                                    2,1 % (+ 0,1)

MONOPRIX (CASINO-GALERIES LAFAYETTE) :                            2 % (0)

CASINO :                                                                                1,7 % (0)

 

"Même si Carrefour apparaît comme le grand gagnant, l'enseigne ne fait que retrouver son niveau d'il y a quatre ans", relativise Gaëlle Le Floch, directrice de l'unité distribution de TNS Worldpanel.

 

Carrefour est l'enseigne qui a le mieux tiré son épingle du jeu depuis l'entrée en vigueur de la loi Dutreil. Celle-ci, en modifiant les règles régissant les relations entre distributeurs et fournisseurs, vise à permettre une plus grande différenciation des enseignes en termes de prix.

 
DÉFENSE DU POUVOIR D'ACHAT
 

S'appuyant sur sa taille et sa puissance, Carrefour a massivement investi pour baisser ses prix. Grâce à ces efforts, les clients sont de retour dans ses magasins. "L'enseigne a su éveiller la sensibilité de toutes les cibles de foyers, surtout des jeunes familles : les mécanismes de fidélisation, soutenus par la carte Carrefour, ont porté leurs fruits et tous les indicateurs sont au beau fixe", souligne Mme Le Floch.

 

La nouvelle donne réglementaire, et les conséquences qu'elle a eues sur la stratégie des enseignes, a en revanche stoppé net la croissance inexorable de Leclerc et du maxidiscompte. Si Leclerc reste numéro un en France, avec 17,1 % de parts de marché, l'enseigne marque le pas.

 

"Pendant des années, la force de Leclerc reposait sur son discours sur la défense du pouvoir d'achat. Désormais il n'est plus seul à tenir ces arguments. Par ailleurs, l'enseigne a sensiblement réduit le nombre de produits bénéficiant du "ticket Leclerc" pour baisser directement les prix dans ses rayons, une stratégie sans doute plus difficile à percevoir par les clients", analyse Mme Le Floch

 

Autre inflexion récente : l'essoufflement du maxidiscompte, dont la part de marché baisse (13,2 %, contre 13,3 % en 2005) pour la première fois depuis son apparition au début des années 1990. Les enseignes classiques, qui ont largement développé des gammes de produits "premiers prix", semblent être parvenues à endiguer le phénomène en allant se battre sur le terrain des maxidiscompteurs. C'est le cas d'Auchan, qui avait beaucoup souffert, notamment dans son fief du Nord, de la concurrence du maxidiscompte. Sa part de marché continue à s'effriter (- 0,1 point), toutefois l'enseigne a réussi à enrayer l'hémorragie. Mais à quel prix !

 
RETOUR EN FORCE D'INTERMARCHÉ
 

"Le revers de la médaille, c'est qu'Auchan, en voulant attirer les ménages les plus modestes, a perdu une partie de sa clientèle plus aisée, qui est partie chez Carrefour", résume Mme Le Floch. Auchan a mené une politique beaucoup plus radicale de substitution de sa marque propre aux grandes marques. Ainsi, au rayon surgelés, 70 % des références sont des produits Auchan.

 

Ce faisant, le distributeur a perdu une partie de sa clientèle aisée, ce qui risque d'avoir un impact sensible sur ses marges. A l'inverse, Carrefour n'a pas joué les gammes de produits à sa marque contre les marques nationales (Danone, Nestlé...). Du coup, son image auprès des consommateurs, en termes de richesse d'assortiment, est intacte.

 

Système U, qui gagne 0,2 point de parts de marché, prouve toutefois qu'on peut développer ses propres marques, tout en gagnant de nouveaux clients. "Les produits "U" représentent 70 % de notre croissance, explique Serge Papin, patron du groupement de distributeurs indépendants. Au regard de ces résultats, notre objectif d'atteindre 10 % de parts de marché en 2010 est réaliste."

 

2006 marque aussi le retour en force d'Intermarché après des années de baisse. Sur l'ensemble de l'année, la performance n'est pas encore spectaculaire (+ 0,1 point). Explication : sur la période, l'enseigne a encore perdu 19 magasins, qui sont passés à la concurrence. Mais les efforts de rénovation des magasins et la baisse des prix ont permis de faire grimper en flèche la fidélisation des clients.

 

Face à cette redistribution des cartes entre distributeurs, le consommateur reste sceptique. Les trois quarts des clients interrogés par TNS n'ont pas remarqué de baisse de prix sur leurs produits habituels et 56 % estiment même que leur pouvoir d'achat a diminué au cours des douze derniers mois. Un ressenti qui se retrouve dans les ventes de produits de grande consommation : elles ont baissé de 1,7 point au deuxième trimestre, après une chute de 2,6 au premier.

Stéphane Lauer
 

Article paru dans l'édition du 15.09.06.

http://www.lemonde.fr/web/article/0%2C1-0@2-3234%2C36-812960@51-867197%2C0.html

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